Avec l’allongement de l’espérance de vie, le nombre de maladies chroniques augmente, et avec lui, le nombre de personnes en perte d’autonomie.
Aujourd’hui, plus d’un Français sur 4 a plus de 60 ans, et un Français sur 6 est porteur d’un handicap.
Si la moitié des plus de 65 ans vivent normalement, 5 à 10 % d’entre eux sont en situation de dépendance.
Enfin, près de 30% des hospitalisations aiguës concernent les personnes âgées.
Ce qui représente 5,4 millions des séjours hospitaliers annuels de courte durée, et 20% d’entre eux sont dus à la iatrogénie médicamenteuse et seraient évitables dans 8 cas sur 10.
Face à ce constat, il a fallu repenser le système de soins et la prise en charge de la dépendance, jugée inefficace et coûteuse.
Les pouvoirs publics ont donc mis en place une politique de santé qui favorise l’hospitalisation de jour, la télémédecine, et le maintien à domicile des personnes âgées dépendantes.
C’est ainsi que depuis l’Avenant 6 de votre CNI, le BSI a progressivement remplacé la Démarche de Soins Infirmiers (DSI) que vous utilisiez pour facturer vos séances de soins infirmiers (AIS).
Mais, qu’est-ce que le BSI et comment l’utiliser aujourd’hui ?
C’est ce que nous verrons dans cet article.
Qu’est-ce que le Bilan de Soins Infirmiers (BSI) ?
Le BSI est un outil dématérialisé qui vous permet de relever l’ensemble des fragilités de vos patients dépendants afin de leur proposer une prise en charge globale mais personnalisée.
Il vous aide à définir, planifier, évaluer et parfois réajuster, l’ensemble des interventions que vous réalisez à leur domicile.
Il permet également une meilleure coordination du parcours de soins, notamment avec le médecin traitant, qui prescrit la rédaction du plan de soins que vous mettez en place, et qui en valide généralement la pertinence.
Le BSI participe donc à la reconnaissance de votre rôle propre.
Comment le BSI a-t’il évolué ?
D’abord prévu pour organiser et facturer la prise en charge des patients de plus de 90 ans, il s’est progressivement déployé pour concerner tous les patients en situation de dépendance, balayant les AIS de vos facturations.
En effet, depuis janvier 2024, les AIS sont systématiquement rejetés s’ils concernent les soins aux personnes dépendantes relevant du BSI.
Depuis cette date, il est également possible de créer et de facturer un BSI pour les patients bénéficiant de l’AME, grâce à un NIR provisoire.
Enfin, la notion d’urgence a été supprimée pour que vous puissiez débuter les soins avant d’avoir renseigné le BSI.
Vous devrez toutefois effectuer votre BSI dans un délai de 7 jours à compter du début des soins.
N’oubliez pas que le BSI doit être clôturé pour pouvoir commencer à facturer les forfaits.
Qui est concerné par le BSI ?
Aujourd’hui, l’outil BSI doit être utilisé pour facturer les soins liés à la dépendance de tous les patients nécessitant une prise en charge infirmière à domicile, sans critère d’âge d’exclusion.
En tant qu’Idel, votre implication dans l’utilisation du BSI est essentielle,
- D’une part, pour évaluer son intérêt dans le maintien à domicile de vos patients dépendants et,
- D’autre part, pour faire évoluer ce nouvel outil, en ouvrant son accès à tous les infirmiers qui prennent en charge le patient au cours d’une même journée, par exemple.
Vos retours sont donc indispensables puisque c’est vous qui utilisez le BSI au quotidien.
Comment Remplir un BSI ?
Étapes clés de la réalisation :
À l’instar de la DSI que vous aviez coutume de rédiger, vous devez utiliser le même raisonnement clinique pour remplir correctement votre BSI.
En premier lieu, vous devrez donc collecter toutes les données nécessaires à l’évaluation de l’état de votre patient dépendant :
- Motif de la prise en charge ;
- Antécédents médicaux, chirurgicaux, obstétriques et psychiatriques,
- Traitements en cours,
- Conditions de vie au domicile : ressources intellectuelles, financières, familiales, etc.
Ensuite, vous analyserez les besoins perturbés en vous basant sur les modèles conceptuels infirmiers reconnus, dont celui des 14 besoins de Virginia Henderson, qui n’a plus de secret pour vous.
Vous poursuivrez votre démarche en rédigeant les diagnostics infirmiers réels et potentiels afin de définir vos interventions prioritaires et d’établir votre plan de soins personnalisé.
Enfin, vous finaliserez ce recueil de données par une évaluation clinique de votre patient : relève des paramètres vitaux (pouls, tension, température, saturation en oxygène…), poids, taille, présence de plaies ou de dispositif médical (sonde vésicale, stomie, voie veineuse, etc.) …
Focus sur les échelles et grilles d’évaluation :
Pour analyser les fragilités de votre patient et appuyer la pertinence de vos interventions, vous disposez d’un ensemble d’outils comme les grilles et les échelles d’évaluation.
Certaines d’entre elles sont d’ailleurs intégrées au BSI, comme :
- La grille SEGA pour évaluer la fragilité,
- L’échelle de Norton ou Braden pour évaluer le risque d’escarre,
- Le Timed Up pour évaluer la motricité et le risque de chute,
- Le MNA pour évaluer l’état nutritionnel,
- Les échelles EVA et Doloplus pour évaluer la douleur et le DN4, pour les douleurs neuropathiques …
Vous pouvez utiliser d’autres échelles et renseigner leur score dans la rubrique « observations complémentaires ». Les outils que vous sélectionnez doivent être homologués. Parmi ceux-ci, on retrouve :
- Les échelles HAD et Hamilton qui évaluent les niveaux d’anxiété et de dépression, fréquemment sous-estimés chez la personne âgée.
- L’indice de Karnofsky, surtout utilisé dans le cadre des soins palliatifs.
- Le NPI (Inventaire Neuro-Psychiatrique), surtout utilisé pour relever les troubles du comportements et leur incidence.
- L’échelle Zarit qui mesure le degré d’épuisement de l’aidant naturel…
Création d’un BSI :
Après avoir recueilli toutes ces informations, vous pourrez alors vous connecter avec votre CPS sur votre espace Ameli pro pour créer et renseigner le BSI de votre patient grâce à son NIR ou sa carte vitale.
Une fois votre BSI complété, l’algorithme déterminera le forfait qui vous est accordé.
Vous vous connecterez alors à votre logiciel métier pour créer votre « ordonnance » patient, renseigner le forfait accordé, et facturer vos soins.
À noter que le BSI est soumis à la prescription médicale et doit contenir l’un des libellés suivants :
- « Soins infirmiers dans le cadre de la dépendance »,
- « Bilan de soins infirmiers »,
- « BSI »
Il a une durée de validité d’un an mais vous pouvez facturer jusqu’à deux BSI intermédiaires sans prescription, si la situation de votre patient l’exige. Son renouvellement est également soumis à la prescription médicale.
Zoom sur l’outil BSI :
Le BSI est composé de plusieurs volets à remplir intégralement : administratif, médico-social, soins, facturation, synthèse…
Le volet médico-social permet d’évaluer la charge en soins directs et indirects en se basant sur des critères objectifs et des grilles d’évaluation.
Il regroupe votre démarche diagnostique et le plan de soins de vos interventions. On y retrouve les soins de base (alimentation, mobilité, hygiène, etc.), les soins relationnels, les soins éducatifs et les soins techniques.
Mais aussi, les critères de majoration liés au patient (IMC sup à 30, agitation, tétraplégie, soins palliatifs, etc.), et ceux liés à son environnement (absence d’aidant, insalubrité du logement, refus du matériel médical, etc.).
Certains diagnostics sont préétablis. Vous devez sélectionner au moins un diagnostic et une intervention du volet médical pour passer à l’étape suivante.
Le volet facturation reprend le statut de votre BSI (initial, intermédiaire, renouvellement), le nombre de passage par jour, leur fréquence hebdomadaire ; les passages en horaires de nuit ; les actes en AMI…
L’outil BSI affiche automatiquement le niveau du forfait journalier à facturer à l’assurance maladie en fonction des interventions saisies dans le volet médical de l’outil BSI.
- Le BSI doit uniquement faire état des interventions que vous réalisez en propre. Vous ne devez pas inclure celles effectuées par des tiers (aidant naturel, aides de vie…).
Le volet synthèse reprend le plan de soins, qui sera transmis au médecin prescripteur et à l’assurance maladie.
Une fois le BSI adressé au médecin traitant, celui-ci a 5 jours pour émettre ses observations et/ou valider votre plan de soins.
Passé ce délai, le BSI est automatiquement clôturé et vous pouvez commencer à facturer vos forfaits.
Facturation et rémunération via le BSI :
Il existe 3 forfaits « dépendance », directement liés à votre charge de travail. Il s’agit des forfaits : BSA, BSB et BSC.
Dénomination de l’acte : | Cotations et prix : |
BSI initial | DI 2.5 = 25 euros |
BSI intermédiaire ou de renouvellement | DI 1.2 = 12 euros |
Dépendance légère : | BSA = 13 euros |
Dépendance intermédiaire : | BSB = 18,20 euros |
Dépendance lourde : | BSC = 28,70 euros. |
Ces forfaits sont toujours payés à taux plein.
Quelles sont les règles de cumul pour les forfaits BSI ?
Dans le cadre de la prise en charge d’un patient dépendant, l’article 11 B 5
s’applique.
Les actes techniques réalisés au décours d’une séance de soins dans le cadre de la dépendance sont facturés avec la clé AMX et les déplacements, avec la clé IFI (auxquels les IK peuvent être ajoutés).
Certains actes codés AMX sont facturables à 50% de leur coefficient, d’autres pourront se cumuler à taux plein.
Vous pouvez toujours facturer un second acte à 50% de son coefficient conformément à la législation en vigueur, et les majorations habituelles (MCI, horaires de nuit, etc.).
Les actes facturables à 50% de leur coefficient les plus fréquemment réalisés sont :
• Les injections intramusculaires, sous-cutanées et intradermiques,
• les vaccinations,
• La surveillance des patients Diabétiques Insulino-Dépendants,
• L’injection d’insuline.
Les actes qui se cumulent à taux plein sont :
• Les Forfaits Perfusions :
AMX 9, AMX 10, AMX 14, AMX 15, AMX 5, AMX 4.1…
• Les Pansements lourds et complexes :
AMX 11 (bilan de plaie) ; AMX 4 ; AMX 5.1 (pansement avec compression), AMX 4.6 (Pansement TPN-Picot), AMX 2.1 (pst additionnel TPN-Picot), AMX1.1.
• Les Séances de surveillance clinique PRADO (AMX 5.8) ;
• Le Prélèvement par ponction veineuse (AMX 1.5).
À noter que les actes dont la clé est SFI (forfait de soins infirmiers) sont considérés comme des actes relevant de la dépendance et ne sont pas facturables avec un BSI.
Les avantages du BSI pour les Infirmiers et les patients :
Le BSI vous permet de :
- Réaliser un plan de soins infirmiers complet et personnalisé pour vos patients dépendants. Il améliore la qualité des soins, encourage les évaluations régulières des besoins des patients et un ajustement rapide de vos actions.
- Simplifier vos échanges d’informations avec les médecins prescripteurs et les caisses d’assurance maladie grâce à la dématérialisation de l’outil.
- D’être rémunéré(s) plus justement et de manière plus transparente, puisque le forfait accordé par la caisse dépend de votre charge réelle de travail, contrairement aux AIS qui étaient soumis au critère de temps. Et, rappelez-vous à quel point il était difficile de justifier la facturation de nos séances de soins cotées en AIS, quand les organismes d’assurance maladie avaient décidé de nous réclamer ces actes en indus.
Enfin, le BSI vous permet aussi de développer votre raisonnement clinique et de mettre en avant votre rôle propre, enfin reconnu grâce à ce nouvel outil.
Pour conclure…
Mis en place depuis le 1er janvier 2020, le BSI a progressivement remplacé la DSI et la facturation en AIS de vos séances de soins infirmiers.
D’abord prévu pour les patients de plus de 90 ans, aujourd’hui, il concerne tous les patients en situation de dépendance, quel que soit leur âge.
Il vous permet de facturer les interventions que vous réalisez dans ce cadre, à la condition expresse que vous ayez préalablement renseigné votre BSI dans l’espace Ameli Pro prévu à cet effet, et qu’il soit clôturé.
Si l’utilisation du BSI permet d’améliorer la qualité des soins, la coordination avec le médecin référent de votre patient, et de facturer plus justement vos actes, en l’état, il reste un point à améliorer : ses conditions d’accès à l’ensemble de l’équipe infirmière qui prend en charge le patient.
En effet, si chaque infirmier peut facturer les actes techniques qu’il a réalisés en plus du forfait BSI, ses indemnités de déplacement et les éventuelles majorations, il ne peut pas facturer le forfait s’il intervient au cours de la même journée qu’un(e) de ses collègues.
À l’heure actuelle, le forfait BSI n’est facturable qu’une seule fois par jour et par un seul infirmier.
Pour conclure, si vous ne vous sentez pas à l’aise avec la manipulation de l’outil BSI, sachez qu’il existe des formations dédiées.
Vous pouvez donc profiter de votre obligation triennale pour participer à une action de DPC qui vous permettra de vous familiariser, à votre rythme, avec l’outil BSI.
Et, ne vous inquiétez pas, c’est aussi en le manipulant régulièrement que vous vous l’approprierez. Il est assez intuitif et les évolutions qu’il a connues ont facilité son utilisation.
Si vous êtes déjà familiarisé avec le BSI, quels conseils pourriez-vous donner à vos collègues novices en la matière ?
Que pensez-vous de ce nouvel outil ? A-t’il facilité votre travail ?
Enfin, si vous avez aimé cet article, pensez à le partager.
Source :
https://www.ameli.fr/infirmier/actualites/generalisation-du-bsi-tous-les-patients-dependants