Cotation et prise en charge des patients diabétiques par l’IDEL : Guide complet

Aujourd’hui, on estime à plus de 4 millions le nombre de diabétiques en France, et les projections évoquent 520 000 nouveaux diabétiques d’ici à 2027. Sa prévalence se situait autour de 6,3 %, en 2022.

Ces chiffres sont d’autant plus alarmants qu’on impute environ 85 000 décès annuels au diabète.

Cette maladie, qui se développe de manière insidieuse, est considérée comme une épidémie, et constitue un véritable problème de santé publique.

En tant qu’infirmiers libéraux, vous êtes l’un des acteurs majeurs dans sa prise en charge.

En effet, les diabétiques représentent souvent 20% de votre patientèle, et qui d’autre que vous connait aussi bien les effets délétères de cette maladie, et les soins attentifs qu’elle requiert au quotidien pour que vos patients vivent avec elle le mieux possible ?

Entre les médicaments, les insulines, la surveillance, la prévention, l’éducation, la gestion des éventuelles complications, et la manière unique qu’a le patient diabétique de réagir à la maladie et aux traitements, d’un jour à l’autre et, d’un de vos passages à l’autre, il y a de quoi être perdu en facturant ces soins spécifiques.

Face à votre implication dans la gestion de la maladie, vous devez pourtant être rémunéré justement, et cela passe par l’application des bonnes cotations.

Suivi régulier du patient et ajustement du traitement :

Le diabète est une maladie silencieuse qui est souvent diagnostiquée au décours d’une de ses complications. Elle est difficile à stabiliser tant les paramètres qui influent sur son équilibre, sont nombreux.

En tant que soignant, vous êtes régulièrement amené à aider ces patients à surveiller l’évolution de leur maladie.

Le plus souvent, vous contrôlez la glycémie et adaptez la dose d’insuline à injecter, mais vous pouvez aussi intervenir pour éduquer votre patient (gestion des hypoglycémies et hyperglycémies, changement de capteur, etc…) ou évaluer et rendre compte de l’efficacité du traitement au médecin entre deux de ses consultations.

En règle générale, si vous intervenez auprès d’un patient diabétique, c’est qu’il n’est pas autonome.

Pensez à ajuster votre prise en charge en fonction des besoins de votre patient, pour que le suivi soit le plus adapté possible à la situation.

Grâce à votre rôle propre, vous pouvez initier des soins liés à la dépendance quand la situation l’exige.

C’est aussi grâce à vos interventions, et au suivi régulier que vous instaurez, que la qualité de vie de vos patients s’améliore, que l’équilibre du diabète est obtenu, et les complications, prévenues.

infirmier parle avec un patient

Éducation thérapeutique :

Parfois, votre patient et son entourage ont besoin d’être éduqués sur la gestion de la maladie et de ses complications ou sur les dispositifs mis en place.

Or, si un forfait hebdomadaire est prévu dans le cadre d’une séance de surveillance clinique uniquement destinée aux patients diabétiques de plus de 75 ans, le reste du temps, l’éducation reste informelle et n’est pas facturable aux caisses d’assurance maladie, sauf si vous êtes détenteur d’un DU en éducation thérapeutique.

Détection précoce des complications :

Comme mentionné ci-dessus, le suivi régulier est essentiel pour surveiller l’équilibre du diabète, contrôler son évolution, déceler les éventuelles complications et prévenir leur aggravation.

Pour cela, vous contrôlez régulièrement l’état des pieds de votre patient, les signes d’infection, et veillez au respect du suivi médical recommandé aux diabétiques pour écarter les complications habituelles telles que les rétinopathies, neuropathies ou encore néphropathies diabétiques : bilans biologiques, visites médicales, fond d’œil, ECG …

Gestion des crises hypoglycémiques et hyperglycémiques :

Les complications les plus fréquemment rencontrées au domicile sont les :

  • Épisodes d’hyperglycémies majeures avec risque d’acidocétose et de syndrome d’hyperosmolarité hyperglycémique (SHH),
  • Épisodes d’hypoglycémie, qui peuvent être sévères et mettre en jeu le pronostic vital, s’ils ne sont pas rapidement pris en charge.

Votre rôle est aussi de sensibiliser votre patient et son entourage, et de veiller à ce qu’un protocole d’urgence soit instauré :

  • Schéma correctif en cas d’hyperglycémie, présence de bandelettes cétoniques au domicile… en cas d’hyperglycémie,
  • Protocole de resucrage, glucagon à disposition… en cas d’hypoglycémie.

Pensez à contrôler régulièrement les dates de péremption des bandelettes ou des kits de glucagon.

Collaboration avec le médecin traitant :

En tant qu’intervenant de première ligne, vous êtes le garant du suivi de votre patient diabétique.

À ce titre, vous devez travailler en collaboration avec l’équipe médicale qui prend en charge votre patient, et lui transmettre régulièrement vos observations, surtout si l’équilibre du diabète semble compromis et qu’un réajustement de traitement semble nécessaire.

Rôle du diététicien et de l’éducateur physique :

Pensez également à initier une coordination avec les professionnels qui gravitent autour de votre patient, pour amorcer un suivi global et optimiser la prise en charge : diabétologue, diététicien, kinésithérapeute, psychologue, etc.

Implication des aidants :

Formez également les proches à la gestion des crises, et à l’administration d’insuline, pour sécuriser la prise en charge au maximum, notamment dans les situations extrêmes pour lesquelles vous ne pourriez pas rapidement intervenir.

groupe de medecins

La cotation des patients diabétiques insulino-traités relève de l’article 5 bis de votre NGAP

C’est l’arrêté du 18 février 2003 qui a permis la bascule de « la prise en charge à domicile d’un patient insulino-traité » du chapitre des « soins de pratique courante » à celui des « soins spécialisés » (article 5 bis).

Dans le cadre de la prévention, les séances de surveillance clinique hebdomadaires sont introduites, mais uniquement pour les patients insulino-traités de plus de 75 ans.

Toujours dans le cadre de cet article 5 bis, les actes comme les pansements lourds et complexes liés au diabète, la glycémie capillaire ou encore l’injection d’insuline peuvent se cumuler entre eux à taux plein

(AMI4 + AMI1 + AMI1).

Cotation des soins liés à la surveillance glycémique :

La surveillance et l’observation de votre patient diabétique englobe à la fois la vérification de la glycémie, qu’elle soit capillaire ou non, et l’ajustement de la dose d’insuline conformément au protocole en vigueur.

Votre Nomenclature prévoit que cette surveillance et cette observation se cote AMI 1 ou AMX 1.

Cette cotation est valable pour vos patients qui nécessitent une adaptation régulière des doses d’insuline en fonction du résultat du contrôle extemporané, et conformément à la prescription ou au protocole mis en place par le médecin référent.

Les glycémies et les doses d’insuline administrées doivent être consignées dans le dossier de suivi de vos patients.

Cette surveillance fait partie des actes médico-infirmiers (AMI) car, c’est surtout l’acte d’ajustement de la dose d’insuline qui est facturable.

Exemple de cotation, chez un patient chez qui vous venez surveiller la glycémie et qui est perfusé (AMI ou AMX 9 + AMI ou AMX 6) :

AMI 9 + AMI 6/2 ou AMX 9 +AMX 6/2.

La surveillance diabétique n’est pas facturable.

Cotation de l’administration d’insuline :

L’administration d’insuline se cote AMI 1 ou AMX 1 pour une injection simple.

Associée à la surveillance diabète et hors cadre BSI, elles se coteront :

AMI 1 + AMI 1, à taux plein, en l’absence d’autres actes.

Associées à un forfait BSI, elles se factureront :

BSX + (AMX 1+1) /2

Cotation des soins de plaies chez les patients diabétiques :

La cotation des plaies chez les diabétiques dépend de la plaie en elle-même : tous les soins de plaie ne sont pas considérés comme des pansements lourds et complexes, y compris en cas de diabète.

Pour qu’un pansement soit considéré comme un pansement lourd et complexe, cumulable à taux plein avec les autres actes du diabète, une détersion et une défibrination doivent être prescrites et tracées dans votre dossier, et surtout être en lien avec le diabète, comme dans le cas du pansement du pied diabétique, qui se cote AMI 4.

L’analgésie topique préalable à un pansement :

Cet acte comprend la dépose du pansement, l’application du produit d’analgésie topique et l’attente nécessaire avant de procéder à la réalisation du soin. Il se cumule à taux plein avec le pansement complexe.

L’analgésie topique est limitée à 8 par épisode de cicatrisation, et renouvelable une fois au plus par épisode de cicatrisation.

Cotation patient diabétique avec un BSI :

L’acte de surveillance de la glycémie et la ou les injections d’insuline, codés AMX, sont cumulables avec les forfaits BSI à hauteur de 50%.

Focus sur les incrétines ou analogues du GLP1.

À l’instar des antidiabétiques oraux, ces molécules, qui ne sont pas des insulines, sont le plus souvent prescrites à vos patients diabétiques de type 2, non insulino-dépendants.

Leur administration par voie sous-cutanée ne relève pas de l’article 5 bis du Chapitre II consacré aux patients diabétiques sous insuline.

Leur cotation suivra donc les règles de cumul classique.

Règles de cumul des actes selon la NGAP :

Les actes de l’article 5 bis se cumulent entre eux à taux plein, et si au cours d’une même séance de soins, plusieurs actes relevant de cet article sont réalisés conjointement à d’autres actes qui n’en relèvent pas, les actes relevant de l’article 5 bis seront considérés comme un seul acte, et la règle des cumuls s’appliquera.

Prenons un exemple concret : le matin, vous réalisez la surveillance de la glycémie (AMI 1), une injection d’insuline rapide (AMI 1), une injection d’insuline lente (AMI 1), la réfection d’un pansement de pied diabétique (AMI 4 + MCI), la réfection d’un pansement post opératoire d’une fracture de poignet (AMI 2), et une injection sous-cutanée de Lovenox (AMI 1).

Vous cotez :

AMI (1+1+1+4) + MCI + AMI 2/2

Les actes reliés au diabète sont associés entre eux à taux plein, le pansement post-opératoire sera coté à 50% de son coefficient, et l’injection de Lovenox ne sera pas facturable, conformément à l’article 11 B.

À noter que vous pouvez ajouter la MCI au pansement de pied diabétique car le risque majeur de plaie de pied diabétique étant l’amputation, le critère de pansement lourd et complexe peut être justifié et majoré de la MCI.

Innovations technologiques pour la gestion du diabète :

Aujourd’hui, pour contrôler et mieux équilibrer le diabète, mais aussi pour faciliter la gestion de la maladie au quotidien, différents outils ont vu le jour : pompe à insuline externe, capteurs de glycémies en continue, applications mobiles pour le comptage des glucides…

Le capteur de glucose, et notamment le système flash, est celui que vous rencontrez le plus fréquemment au domicile.

Il permet de mesurer en continu le taux de glucose interstitiel dans le tissu sous-cutané, et de transmettre les mesures à un « récepteur » : lecteur de glycémie, application mobile, pompe externe.

Télémédecine et suivi à distance :

Avec l’arrivée de ces nouveaux dispositifs de surveillance continue, qui permettent de partager les résultats instantanément avec l’équipe médicale, et l’essor de la télémédecine, il est plus facile de contrôler l’équilibre du diabète et de réajuster les traitements.

Prise en charge par l’Assurance Maladie :

Au domicile de vos patients, vous rencontrerez surtout le capteur FreeStyle Libre 2 ou 3 de chez Abbott.

La prise en charge des capteurs FreeStyle Libre 2, par les organismes d’assurance maladie, est réservée aux diabétiques de type 1 ou 2 :

  • Âgés de 4 ans minimum
  • Sous insulinothérapie intensive (plus de 3 injections quotidiennes).

Les diabétiques de type 2 qui nécessitent moins de 3 injections d’insuline par jour, peuvent aussi bénéficier de la prise en charge par les caisses d’assurance maladie si le diabète est déséquilibré : hémoglobine glyquée supérieure ou égale à 8%.

Les caisses d’assurance maladie prennent en charge :

  •  1 lecteur de glycémie tous les 4 ans, possiblement 1 supplémentaire pour les enfants âgés de 4 à 18 ans.
  • 26 capteurs par an : la durée de vie est de 14 jours chacun.
  • 100 bandelettes et 100 lancettes par an pour les diabétiques de type 1 sous capteur.
  • 200 bandelettes par an pour les diabétiques de type 2 non insulinés.

À noter que votre patient peut contacter le Service clients Abbott France en cas de dysfonctionnement du capteur délivré.

Un nouveau capteur sera adressé par pli postal à son domicile.

À noter aussi que le capteur FreeStyle Libre 3 ne sont pas encore pris en charge par les organismes d’assurance maladie.
Toutefois, certaines mutuelles peuvent éventuellement prendre une partie des frais à leur charge.

N’hésitez pas à vous renseigner auprès du pharmacien ou de la mutuelle de votre patient.

Comme nous venons de le voir, la cotation des actes aux diabétiques n’est pas chose facile.

Un jour, votre patient sera parfaitement équilibré et vous n’interviendrez que pour contrôler la bonne exécution de la prescription ; un autre, il peut être déséquilibré et vous devrez ajuster les doses d’insuline ; un autre encore, une complication peut survenir comme une blessure au pied, que vous devrez alors étroitement surveiller.

Quand vous prenez en charge ce type de patients, dont le suivi varie autant, pensez à consigner quotidiennement les actes que vous réalisez, non seulement pour optimiser le suivi, mais aussi pour coter correctement vos actes et percevoir la juste rémunération de votre travail.

Nous l’avons également évoqué, la recherche sur le diabète ne cesse de progresser et fait naître des nouvelles technologies, et avec elles, de nouvelles pratiques.

Il est donc primordial d’actualiser régulièrement vos connaissances avec les actions de DPC, pour offrir à vos patients la meilleure prise en charge possible, et optimiser votre facturation.

Et si vous avez trouvé cet article utile, n’hésitez pas à le partager ou à en parler avec vos collègues.

Newsletter

Inscrivez-vous à notre newsletter pour recevoir toutes les actualités !

Suggestion d'articles

Quelle profession exercez-vous ?